Introduction
Les agrumes (Citrus spp.) représentent une culture fruitière majeure dans de nombreuses régions du monde, notamment dans les zones méditerranéennes, subtropicales et tropicales. Cependant, leur production est régulièrement menacée par divers ravageurs, dont les thrips, de minuscules insectes appartenant à l'ordre des Thysanoptères. Parmi les espèces les plus préoccupantes pour les agrumes figurent Scirtothrips aurantii (thrips sud-africain des agrumes), Frankliniella occidentalis (thrips occidental des fleurs) et Pezothrips kellyanus. Ces insectes causent des pertes économiques importantes en affectant à la fois la qualité des fruits et la santé des plantes.
Biologie et cycle de vie
Les thrips sont de petits insectes allongés, mesurant généralement entre 1 et 2 mm, munis de deux paires d’ailes frangées. Ils passent par plusieurs stades : œuf, deux stades larvaires, puis deux stades nymphaux avant de devenir adultes. La durée du cycle dépend des conditions climatiques, notamment de la température et de l’humidité. En conditions favorables (25-30 °C), un cycle complet peut être accompli en deux à trois semaines.
Les femelles pondent leurs œufs directement dans les tissus végétaux, ce qui les rend difficiles à détecter. Les larves se nourrissent de cellules végétales en les perforant avec leurs pièces buccales piqueuses-suceuses, ce qui provoque des dégâts visibles sur les feuilles, les fleurs et surtout les jeunes fruits.
Dégâts causés aux agrumes
Les thrips attaquent principalement les jeunes tissus végétaux, en particulier :
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Fleurs : Les attaques sur les bourgeons floraux peuvent entraîner une chute prématurée, une déformation ou une stérilité des fleurs, réduisant ainsi la nouaison.
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Feuilles : Les jeunes feuilles attaquées présentent des taches argentées, des déformations et un enroulement, compromettant la photosynthèse.
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Fruits : Les jeunes fruits sont particulièrement vulnérables. Les piqûres de thrips provoquent des cicatrices liégeuses, des anneaux grisâtres ou argentés, souvent appelés « silvering », nuisant fortement à l’aspect commercial du fruit. Chez certaines espèces comme Pezothrips kellyanus, les cicatrices peuvent s’aggraver avec le temps, rendant les fruits invendables.
Espèces d’importance économique
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Scirtothrips aurantii : Espèce particulièrement nuisible en Afrique du Sud, où elle est endémique. Elle attaque les jeunes pousses et les fruits nouvellement formés.
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Frankliniella occidentalis : Cosmopolite et très polyphage, elle peut également transmettre des virus, bien que ce soit moins fréquent chez les agrumes.
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Pezothrips kellyanus : Présente dans la région méditerranéenne et en Australie, elle est connue pour causer des cicatrices profondes sur les agrumes.
Stratégies de lutte
La lutte contre les thrips des agrumes nécessite une approche intégrée, combinant différentes méthodes :
1. Surveillance
L’utilisation de pièges chromatiques bleus ou jaunes permet de suivre les populations adultes. Une observation régulière des jeunes fruits est aussi essentielle pour détecter les premiers signes de dégâts.
2. Lutte culturale
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Éviter les tailles excessives qui favorisent l’émission de jeunes pousses sensibles.
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Gérer l’irrigation pour éviter un stress hydrique favorisant les infestations.
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Éliminer les mauvaises herbes hôtes alternatives autour des vergers.
3. Lutte biologique
Les prédateurs naturels tels que les punaises anthocorides (Orius spp.), les acariens prédateurs (Amblyseius spp.) et certaines espèces de chrysopes peuvent réguler les populations de thrips. L’introduction ou la conservation de ces auxiliaires est encouragée en agriculture biologique.
4. Lutte chimique
Elle doit être utilisée en dernier recours, de manière raisonnée et ciblée. Les insecticides autorisés doivent être choisis en fonction de leur efficacité, de leur sélectivité vis-à-vis des auxiliaires et de la résistance des thrips. L’alternance de substances actives est cruciale pour éviter les résistances.
Conclusion
Les thrips constituent un ennemi redoutable pour les cultures d’agrumes, en particulier durant les phases sensibles de floraison et de nouaison. Une stratégie de lutte intégrée, combinant surveillance, bonnes pratiques culturales, protection biologique et traitements chimiques ciblés, s’avère indispensable pour maintenir des niveaux de populations sous les seuils économiques de nuisibilité. La sensibilisation des producteurs, la formation continue et l'adoption de techniques durables sont des leviers clés pour limiter l’impact de ces ravageurs.
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